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11 avril 2011 1 11 /04 /avril /2011 20:25
904975Même si la Grèce chante sur tous les tons que, jamais, elle ne réaménagera sa dette publique, les investisseurs feraient bien de ne plus écarter ce scénario pour plusieurs pays en difficulté de la zone euro. Reste à connaître les conséquences d’un réaménagement de dette.

Même si plusieurs décideurs européens essaient de remonter le moral des troupes, une solution possible aux problèmes financiers des pays en délicatesse avec leur budget (les pays PIGS, pour Portugal, Irlande, Grèce et Espagne) passe bel et bien par un réaménagement de leur dette. Dans ce scénario, le gouvernement interrompt le paiement des intérêts et des remboursements en capital des obligations qu’il a émises. Après négociations avec les créanciers, les montants dûs sont remboursés sur une plus longue période et/ou à un taux d’intérêt modifié. Si ce processus devait se passer sans heurts, le réaménagement de dettes serait peu contesté. En pratique toutefois, l’expérience montre que la formule s’accompagne de plusieurs effets secondaires.

1. Remboursement incomplet

Dans la plupart des cas, après réaménagement de la dette publique (obligations), il y a perte d’une partie du capital investi. C’est ainsi que lors du réaménagement de la dette argentine à la fin des anées 90, les investisseurs n’ont récupéré en moyenne que 44 % de leur mise. Les gouvernements doivent avoir la possibilité, mais aussi la volonté de réaménager leur dette. Contrairement aux entreprises, les pouvoirs publics n’ont pas de contrainte légale. Souvent, la pression politique de la communauté internationale sur un État a même un effet contraire.

 

Alors que précédemment, les pouvoirs publics émettaient souvent des obligations entre eux, nous constatons, dans les trois dernières décennies, un plus grand étalement des dettes publiques. Au-delà des banques et des assureurs, les entreprises et les particuliers de tous les pays peuvent facilement prendre des obligations publiques en portefeuille. D’où les craintes européennes vis-à-vis du réaménagement de la dette de, mettons, la Grèce. Elle pourrait entraîner une nouvelle crise bancaire et économique de grande échelle.

2.  Dévaluation de la monnaie

La réduction de valeur des dettes peut également contribuer à en faciliter le règlement, du moins en apparence. Généralement, la dévaluation d’une monnaie est concomitante au réaménagement de la dette par les pouvoirs publics. Mais pour les détenteurs étrangers, une chute des taux de change représente évidemment une perte supplémentaire. Lorsqu’en 1998, la Russie a suspendu pendant trois mois le remboursement de sa dette extérieure, la banque centrale a  laissé dévaluer le rouble. Pendant cette brève interruption, la devise russe a reculé de pratiquement 70 pour cent par rapport au dollar américain. Sans être confrontés à un réaménagement au sens strict, les détenteurs étrangers de ces obligations n’en ont pas moins vu s’évaporer une grande partie de leur investissement. Le côté positif d’une dévalorisation significative de la monnaie est qu’elle stimule les exportations, opération qui, à son tour, peut soutenir la croissance économique à long terme.

 

En Europe, la plupart des pays participent à la monnaie unique. Les États qui, comme l’Irlande, connaissent des problèmes ne peuvent donc utiliser cette arme. Comme la politique monétaire est aux mains de la Banque Centrale Européenne, il ne reste aux États de la zone euro que la politique budgétaire. Si, dans ces conditions, un État devait opter pour le réaménagement de sa dette, cela pourrait bien miner le principe de solidarité de la zone euro.

3. Le doute des investisseurs

Un État qui a un réaménagement de la dette à son actif devra compter sur de longues années de méfiance des marchés financiers. Une telle opération n’est, à vrai dire, pas un signe de bonne gouvernance. À la suite des obligations et de la monnaie, c’est également le marché local des actions qui fera le plongeon. L’indice boursier de l’Islande, converti en euro, a capoté de 96 % fin 2008. Bien évidemment, les faillites des banques locales ont été à l’origine de cette chute vertigineuse, mais les autres actions ont senti le vent du boulet, elles aussi. Par ailleurs, la rupture de confiance qui fait suite au réaménagement d’une dette publique se traduit par une forte hausse des taux d’intérêt auxquels l’État pourra contracter ses nouveaux emprunts. Ici, la prime de risque montre sa vraie nature. Dans certains cas, on constate même une hausse spectaculaire de l’inflation, ce qui renforce encore la "répugnance" des investisseurs.

Pour le moment, on observe déjà une baisse de forme des cours et une hausse des primes de risque dans les pays PIGS. Mais en cas de réaménagement effectif, la réaction des marchés financiers sera violente, avec une punition possible dans toute la zone euro.

Une solution?

Pour que l’Europe puisse sortir de la problématique de l’endettement, existe-t-il une alternative au réaménagement? En fait, oui. Actuellement, plusieurs organismes internationaux comme la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International et le Fonds européen de stabilité financière s’annoncent comme "lender of last resort", prêteur en dernier ressort. Mais il va de soi que ces instances posent, elles aussi, des exigences élevées aux États qui viennent frapper à leur porte pour le refinancement de leur dette. À ce moment d’ailleurs, la confiance des marchés financiers est déjà largement entamée. Que les pays où le problème se pose optent pour le réaménagement ou pour l’aide, l’ajustement de la dette publique est toujours un processus long et douloureux, pour l’investisseur également.

Source: Monargent.be

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